Budget Rectificatif 2022 : un avant goût du Primitif 2023
18 Novembre 2022
​
​
Le Budget Rectificatif 2022 a été voté au Conseil national le 18 octobre dernier. Voici l'analyse que l'on peut faire de ce budget qui dépasse pour la première fois les 2 milliards €, un avant goût du Budget Primitif 2023.
​
​
Préambule
​
En préambule, il convient de rappeler que toutes les remarques concernant les documents budgétaires (voir ici) sont toujours d’actualité. Si la loi de clôture est en bonne voie de voir enfin le jour, le Gouvernement n’a malheureusement jamais donné suite à la demande de Monaco 2040 pour que le Fascicule Budgétaire (ou tout document permettant de comprendre la loi de budget ainsi que les séances publiques qui y sont dédiées) soit enfin public.
​
​
Faits notables
Les faits notables du Budget Rectificatif 2022 sont les suivants :
​
-
« Grâce » à Omicron, qui n’existait pas encore à l’époque où le Budget Primitif 2022 a été voté, la plupart des restrictions pour covid ont été levées au printemps et les recettes de TVA ont été largement révisées à la hausse par rapport au Budget Primitif (+100M€).
​
-
Le troc de Testimonio II a été décomposé en recettes (206M€) et dépenses (même montant, 206M€). Si on peut se réjouir qu’enfin les trocs soient décomposés en recettes et dépenses, on peut s’interroger sur la méthode employée pour déterminer la valeur à affecter en recettes et dépenses. En effet, la décomposition du troc Testimonio II à sa juste valeur aurait dû aboutir à des niveaux de recettes et dépenses nettement plus élevés que les 206M€. Rappelons que l’intérêt de la décomposition du troc à sa juste valeur est d’avoir la meilleure estimation possible de nos dépenses et recettes réelles. Si on se trompe sur la juste valeur du troc, on a une mauvaise estimation de nos dépenses et recettes réelles. Ce problème devrait toutefois bientôt disparaître parce que nous n’aurons bientôt plus de terrain à troquer. Les prochains trocs à décomposer seront ceux de l’esplanade des Pêcheurs et de l’Annonciade, et ensuite ce sera fini, toutes les dépenses et recettes officielles seront bienles dépenses et recettes réelles et tant mieux.
​
-
Enfin, on remarque qu’il n’y a toujours pas de provision pour la retraite des fonctionnaires (elle aurait dû être de plusieurs dizaines de M€) dont le coût annuel a dû être de nouveau réévalué au cours de ce Budget Rectificatif (+4.7M€ par rapport aux prévisions), en bonne partie pour cause de forte inflation, les retraites y étant tacitement indexées
​
Globalement, pour la première fois de l’histoire, les recettes et les dépenses dépassent les 2Md€ (même si elles auraient dû être nettement plus élevées en décomposant le troc Testimonio II a sa juste valeur) :
Un peu de recul nécessaire avant le Primitif
​
Avant de procéder à l’analyse du Budget Primitif 2023 qui sera faite prochainement sur Monaco 2040 et de manière plus approfondie, proposons de prendre un peu de recul sur l’évolution de nos politiques budgétaires et les interrogations qu’elles suscitent aujourd’hui.
​
En analysant ce Budget Rectificatif 2022, on remarque immédiatement qu’on ne cherche pas à mettre d’argent de côté. Quand les recettes sont nettement meilleures que ce qui était prévu (c’est le cas par exemple en 2022 avec une hausse spectaculaire de la TVA au-delà des prévisions), on ne met pas cet excédent en réserve, on le dépense aussitôt.
Mais cela ne date pas d’aujourd’hui. Observons dans le passé la part de nos recettes annuelles qui ont été épargnées et versées chaque année au Fonds de Réserve Constitutionnel (FRC) :
​
Dans les années 1980 (et sans doute avant aussi mais les données ne sont pas disponibles) on mettait 20% des recettes annuelles de côté (c’est d’ailleurs comme ça qu’on a pu constituer la partie liquide du Fonds de Réserve qui garantit notre souveraineté). Ensuite de 1990 à 2021, on n’a globalement rien épargné, tout a été dépensé et investi.
Cela se voit d’ailleurs sur la valeur de la partie liquide du FRC qui n’a pas vraiment évolué depuis 2010 (elle a surtout suivi l’évolution des marchés financiers dans lesquels elle est investie à 100%) : entre 2010 et 2021 la partie liquide du FRC a augmenté de 20% environ quand les recettes (ou dépenses) annuelles ont augmenté de 130% [1]:
​
Pourquoi une telle évolution ? Pourquoi nos réserves ne suivent-elles plus du tout l’évolution de nos recettes et dépenses ? Considère-t-on qu’avec une partie liquide du FRC contenue entre 2Md€ et 2.5Md€ la solvabilité future de l’Etat est assurée ? Aurions-nous trop épargné à une époque ?
​
En réalité, toutes ces questions se rejoignent et relèvent du même phénomène : il manque aujourd’hui un élément essentiel pour savoir si on doit épargner ou si on peut s’autoriser à dépenser, et que nous avons développé ici. Faire du FRC le garant de notre modèle économique et social devient de plus en plus souhaitable afin de piloter l’action publique de manière optimale tout en préservant l’avenir.
​
​
Le Budget Primitif 2023 sera l'occasion d'approfondir toutes ces questions lors d'une prochaine publication.
​
​
[1] On fait l'hypothèse que le canton dédié à la retraite des fonctionnaires ne se trouve pas dans la partie liquide FRC, même le Gouvernement n'a jamais précisé s'il se trouvait la partie liquide ou dans la partie illiquide du FRC